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Métal : Le Musée d’Airain

La nouvelle cathédrale d’Eric Liberge

Paris, 1931. En enquêtant sur les crises hallucinatoires de l’antiquaire Eugen Berzélius, la jeune journaliste Ingrid van der Graaf récupère fortuitement un coffret contenant des sphères de métal. A leur contact, elle est violemment projetée dans l’Echelle, un dédale inintelligible et pourtant étrangement familier, où l’attend son esprit-frère. Simultanément à Prague, l’Antichambre, une communauté secrète, s’apprête à inaugurer le « Musée d’Airain », une collection de pièces d’armurerie dont la datation et l’origine laissent perplexes tous les experts. L’Antichambre est porteuse d’une vérité incroyable : qui sait lire dans la mémoire du métal peut partager plusieurs existences simultanées...


Métal, la dernière bande-dessinée d’Eric Liberge, est de celles qui vous procurent un éblouissement immédiat, un pur choc sensitif, un trip d’une rare puissance. Cela parce que l’imaginaire propre au fantastique et l’exubérance totalement maîtrisée des parti-pris visuels de l’auteur s’abouchent ici idéalement (les délires graphiques totalement en accord avec leur sujet ne sont pas légion. On pourra citer par exemple Orion de Masamune Shirow, ou le récent Ultima Parano de JB, Steph et Gess).

Liberge utilise avec une liberté inouïe et une évidente jubilation des techniques composites qui s’interpénètrent dans un maelström créatif de chaque instant ; effets d’onde, images de synthèse 3D, granulation, profusion des stries, surimpression de motifs géométriques, traitement non naturaliste des couleurs (mono-chromatisme à dominante sombre, subtilement dégradé), effets de transparences, contours passés en négatif, superpositions discrètement matiéristes, intégration d’éléments photographiques, cases débordantes jusqu’à leur suppression, etc. A quelques approximations près dans le trait (les mains du peintre et de son modèle, p.9, par exemple...), le génie visuel ici à l’œuvre à de quoi en ébouriffer plus d’un, et renvoyer par la même occasion à leur pelle et leur seau les colorisations type Sillage, Golden City, et autres œuvres de science-fiction contemporaine se croyant inévitablement appelées par la dimension technologique du genre à user de teintes infographiques lisses et froides. Cet avatar technique de la bonne vieille encre n’est que trop rarement pensé en tant que nouvelle possibilité expressive, et à ce jour, seuls les plus audacieux se la sont appropriée de manière radicale. Nous songeons ici tout particulièrement aux textures hyper-réalistes de Fred Beltran dans Mégalex, mais aussi au travail de Nicolas de Crécy inauguré dans le tome 3 du Bibendum céleste, sur le lien entre planéité/relief et granulation/hachurage, et à Eric Liberge, qui avec Métal se sert de l’outil infographique comme d’un liant pour ses techniques mixtes. (JPEG)

A la première lecture, l’œil crépite donc en tous sens, littéralement aspiré par une transmutation permanente, la narration cataractant entre furie textuelle et constellation syncrétique des formes. Mais en refermant l’album, on se demande vaguement si cette saisissante déflagration ne masque pas une construction sommes toutes assez facile. Un des travers les plus détestables du fantastique consiste en effet à se permettre, sous prétexte que le genre traite précisément de la perte des repères rationnels, de sacrifier la causalité des enchaînements et la rigueur narrative.

Malgré quelques maladresses introductives (la légère lourdeur explicative des bulles sur les 4 premières planches), des personnages un brin monolithiques, et une progression narrative qui veut peut-être un peu trop jouer au chat et à la souris avec le lecteur avant d’en venir au fait - ceci sans exploiter réellement les possibilités dramatiques des différentes hypothèses abordées (théories de l’ensorcellement, du complot manipulateur) -, force est de constater que Métal est bel et bien de ces bandes-dessinées dont la densité et la cohérence apparaît au fil des relectures, appelant une participation particulièrement active du lecteur pour en démêler l’écheveau.

Métal est une oeuvre complexe, qui entraîne un pur plaisir spéculatif. Car finalement, dans cet album inaugural où nous sont distillées de nombreuses informations, la logique globale de fonctionnement de l’univers, ainsi que ses implications dramatiques et thématiques, se laissent seulement pressentir. Les éléments ne se recoupent pas parfaitement ; certains semblant ressortir de la micro-incohérence (les propos d’Anselmo p.8, l’emplacement exact de la Forteresse des Eaux...), d’autres d’une nébulosité confortable (la nature de l’Ecuyer, le lien vital entre esprits-frères...). Il est incontestable que Liberge amorce là un projet ambitieux. Reste à savoir si nous avons affaire à une narration un peu embrouillée, où à d’imperceptibles jalons dans un dessein minutieusement maîtrisé.

De quoi est-il question ici ? Monsieur Mardi-Gras Descendres, la précédente série d’Eric Liberge, donnait de l’au-delà une vision absurde, grinçante et paradoxalement émouvante dans sa célébration de la vie (tous les personnages sont des squelettes). L’auteur y opérait un détonnant assemblage entre perspective chrétienne de l’après-vie (au travers d’un emprunt adroit à La divine comédie de Dante), discret ancrage alchimique (en permettant de lire ses vies antérieures, l’alchimie était une modalité essentielle pour échapper à l’obscurantisme de la théocratie administrative), notions de réincarnation et de karma (traditionnellement perçues par les mystiques comme un moyen pour l’homme de mieux se réaliser, entendre s’approcher du divin qu’il porte en lui par décantations successives), et réalité physique de notre système solaire (le Purgatoire se situant sur Pluton). Avec ce dispositif audacieusement syncrétique, Liberge voulait actualiser par son prisme propre la vérité qui veut que l’homme n’apprend sur lui-même et sur ses semblables que dans la souffrance (un homme heureux ne voit pas ceux qui éprouvent le manque ou l’adversité). La déshumanisation de l’univers de Monsieur Mardi-Gras Descendres avait pour but de faire comprendre à ses personnages - et partant, aux lecteurs - l’Humanité (l’emprisonnement arbitraire vécu par les protagonistes n’ayant pas pour autre visée que de leur apporter la révélation intérieure de la liberté et de la justice), ainsi que l’absolue nécessité de responsabiliser ses actes. La connaissance de Dieu ne s’obtenait que par de grands efforts sur soi, et l’homme, empêtré dans sa paresse, était voué à l’éternel recommencement de sa bêtise et de ses péchés (c’est tout du moins ce qu’on peut conclure au vu des trois premiers volets. Le quatrième et dernier tome pourra peut-être invalider ce pessimisme). Ce détour nous amène nécessairement à voir si Métal s’inscrit dans une même perspective et il convient pour cela d’en décortiquer les rouages. Les personnes soucieuses de préserver la surprise de leur expérience de lecture voudront bien ne pas tenir compte des développements suivants.

Chamanisme, alchimie, univers multiples : les lois de l’Echelle

Dans Métal, la Terre, telle que les hommes la connaissent, s’avère n’être en fait qu’une possibilité parmi une continuité d’univers collés. En réalité, les différents mondes (ou plans, ou dimensions) sont reliés les uns aux autres par un gigantesque labyrinthe communément nommé l’Echelle (aussi appelé Grande Echelle par le forgeron Nocton, et Vestibule des Jardins Parallèles par la créature que rencontre le peintre Grégor Podzamok, p. 20). Lorsque Ingrid pénètre malencontreusement et pour la première fois dans l’Echelle, le chat Astartée lui dit : « Un souffle de plus et nous te perdions dans le dédale de l’Echelle ! Car elle est haute, Ingrid van der Graaf ! L’œuvre de ta famille fut d’en mettre à jour les premiers Barreaux. » (p.29)

Les Barreaux ne sont qu’une convention pour désigner les univers collés, puisque de fait, l’Echelle ne semble pas devoir présenter de forme préétablie ; pour Ingrid, il s’agit d’un chaos tridimensionnel d’escaliers ou de tétraèdres, directement inspiré par les œuvres de Maurits Escher, dont elle est une admiratrice, alors que pour Grégor il est question d’une grotte aux reliefs déchiquetés, débouchant sur des agrégats de blocs de pierre à perte de vue. Vraisemblablement, l’Echelle revêt une apparence propre à la psyché de chacun de ses visiteurs. Cet espace-temps en dehors de la vie s’avère être gouverné par des lois physiques dérivées de l’alchimie. Astartée le chat dit encore : « car la jeune femme s’égarerait entre l’esprit et la matière, dans un océan de tourbillons sans lois physiques où nous ne pourrions rien pour elle... » (p.28) en faisant référence à l’éventualité d’une interruption du lien tissé entre Ingrid et l’Echelle au moment de son premier transit. Ainsi, nous pouvons avancer que l’Echelle est bien le domaine du pur esprit, même si le fait que les protagonistes gardent leur apparence corporelle ne le rend pas perceptible de prime abord (Ingrid se dévêt quelque peu au passage cependant ; une fantaisie de l’auteur ?). Au contact d’objets catalyseurs, l’esprit se détache donc de son enveloppe corporelle sise dans un monde pour venir dans l’Echelle, où se trouvent des portes, qui sont les points d’accès des différents plans. En passant l’une de ces portes, l’esprit s’incarne dans une autre enveloppe charnelle, vivant une vie parallèle dans un autre monde (ce que fait Ingrid à la fin du tome, devenant Thérionne, future reine d’Urizen). On a là encore une association harmonieusement menée par Liberge, entre théorie astrophysique des univers parallèles et chamanisme. Or pour le chaman, l’expérience extatique vise à régler des problèmes de sa communauté en se rendant au Ciel ou aux Enfers (rencontre avec les Dieux).

Voyons comment cette bi-polarité est réutilisée par Eric Liberge ; Nocton dit d’Ingrid qu’elle « chute vers le Plomb », ce à quoi Astartée surenchérit : « sa descente se fait abyssale... Nous allons la perdre ! Il faut la rattraper avant qu’elle ne dépasse les Citernes d’Eléazar ! » (p.28 toujours) Bien qu’il s’agisse aussi d’un langage métaphorique, on voit ici que les initiés du labyrinthe y instituent un haut et un bas, certainement parce qu’au contraire des hommes, ils sont plus sensibles aux énergies alchimiques qu’à une représentation matérielle. Ainsi, l’extrême bas de l’Echelle semblerait débuter avec les Citernes d’Eléazar, nom dont on ne sait pas encore s’il a une signification précise ou s’il s’agit simplement d’un exotisme facile. L’eau des citernes évoque précisément la phase de purification qui intervient souvent avant l’initiation chamanique (tout comme le massage final, p. 48). Plus généralement, le symbolisme des Citernes renvoie aux hiérophanies aquatiques où l’eau est germinative, à la fois préexistence et manifestation formelle. A son contact, l’individu se régénère ; il naît de nouveau. Liberge en fait un élément associé à la mémoire (dans Monsieur Mardi-Gras Descendres, le fleuve donne l’oubli, ici les Citernes éveillent les souvenirs enfouis). Si l’on se réfère précisément aux planches 30 à 32, on se rend compte que « Citernes » est en fait un terme générique quelque peu abusif pour désigner ce qu’Ingrid se rappelle être la Forteresse des Eaux, sorte d’ensemble architectural composé de thermes et des citernes proprement dites. Celles-ci s’avèrent être d’innombrables colonnes émergeant de l’eau, chacune d’entre elles correspondant à une entité complète (deux esprits-frères). Tel qu’elles sont nommées par Astartée et Nocton, les Citernes semblent être un lieu spécifique de l’Echelle, un sorte d’antichambre vers les mondes parallèles, permettant aux humains de recouvrer le souvenir de leur vies antérieures et d’accepter leur esprit-frère ; cependant, il nous semble déceler ici une incohérence, car la Forteresse des Eaux se situerait par ailleurs sur le monde d’Urizen (« ...raccourci idéal pour rejoindre ta Forteresse des Eaux, au cœur du monde d’Urizen » dit Astartée p. 43).

Toujours est-il que le Plomb exerce une force d’attraction vers le bas de l’Echelle, au pied de laquelle se tient sa manifestation la plus pure : « la nuit des métaux barbares ». D’après les dires de Nocton : « ...la femme n’emprunte pas le bon chemin ! Elle chute vers le Plomb. Géniteur des guerres, des épreuves et du chagrin... Ce n’est pas là qu’elle est attendue ! » On peut d’ores et déjà en conclure assez facilement que l’Or est l’antinomie du Plomb (concorde, abondance, bonheur), et se situe en haut de l’Echelle, dont la verticalité symbolise la transmutation alchimique, les Barreaux étant autant d’alliages intermédiaires, c’est-à-dire autant d’étapes de développement civilisationnel entre le chaos des origines et l’âge d’or, autant de stades du développement de l’âme humaine, entre Enfer et Paradis (vision chrétienne que semble ici encore privilégier Liberge, comme en atteste l’absence d’esprits intermédiaires ou l’évocation d’un quelconque panthéon. Dès lors, l’Echelle peut aussi se lire comme l’Echelle de Jacob). Liberge traduit ici de manière littérale l’objet véritable de l’alchimie : la recherche mystique intérieure d’un rapprochement avec Dieu, via l’amalgame de l’esprit et de la matière.

Reprenons d’une manière plus complète les dires d’Astartée, p.29 : « Un souffle de plus et nous te perdions dans le dédale de l’Echelle ! Car elle est haute, Ingrid van der Graaf ! L’œuvre de ta famille fut d’en mettre à jour les premiers Barreaux. Mais ce qu’elle n’a pu mener à terme, serais-tu, toi, de taille à l’accomplir ? Ces gens ont pris soin de te lier à leur quête, telle l’une des pièces d’un engrenage, mais rassure-toi ; tu n’es pas la seule ! » (nous soulignons)

Ici se profile un enjeu narratif majeur pour la suite de la série. Cette quête, dès lors qu’on accepte l’optique chrétienne, est évidemment celle de Dieu, c’est à dire de la connaissance. En cherchant à progresser vers le haut de l’Echelle, ces gens mystérieux (Liberge ne lève le voile que sur le père d’Ingrid, qui témoigne du mode de désignation privilégié du chaman : la transmission héréditaire) ne cherchent-ils pas à fuir l’obscurantisme infernal du Plomb ? Ce qui s’avère particulièrement intéressant, c’est qu’au regard des nouveaux mondes découverts (Rarrk, Caracalla, Pertinax, et Urizen, cf. p.40), et sachant que les hommes de Terre ne peuvent apparemment explorer que des dimensions contiguës, il apparaît que notre propre monde est situé bas dans l’Echelle, en plein dans les influences mauvaises du Plomb (en donnant la mesure des Barreaux restant à parcourir, Liberge relativise symboliquement la place du règne de l’Homme dans l’univers, ce qui est un élément fondamental dans la voie de la sagesse recherchée par les mystiques croyant en la réincarnation).(JPEG) Que l’on songe ici au parchemin lu par le Grand Septuagésime dans le tome 2 de Monsieur Mardi-Gras Descendres pour constater la cohérence thématique de Liberge. Il y est écrit « Or Intellect et Ars Generalis le mèneront au Pied de l’Echelle de l’Oeuvre tombée des Lumières Majeures pour en gravir les Subdivisions et retourner à Dieu. » On voit que cette notion d’échelle devient ici question centrale, mais l’affaire est néanmoins différente car les protagonistes ne ressortissent pas d’une humanité abandonnée ; ce sont des élus. Ils ne sont plus les révoltés de Dieu, mais les conquérants de multiples univers, dont les enjeux particuliers s’interpénètrent (autrefois le débordement de Trajan sur Terre, aujourd’hui l’apparition massive d’armes d’Urizen dans notre plan, p. 41), les actes d’un individu dans un monde affectant son esprit-frère ailleurs. Ainsi, si les implications dans Mardi-Gras Descendres étaient avant tout de comprendre son environnement et d’échapper à sa condition, ici elles semblent être de se livrer à un affrontement à l’échelle de mondes entiers (Ingrid-Thérionne confrontée à sa royauté, doit sauver Urizen d’un mal qui ne nous est pas encore vraiment révélé). En effet, la tradition chamanique opère chez certains peuples une bi-partition entre « chamans noirs » qui dialoguent avec les Esprits des Enfers, et « chamans blancs » qui perçoivent les Esprits du Ciel. A ce titre, Anselmo décrit l’objet catalyseur qui le lie à l’actrice Paula Maxa en ces termes : « Une sphère majeure assortie des quatre mineures pour le règne de l’Or. Le lien dévolu à Maxa et qu’elle n’a jamais voulu toucher. » Plus loin Astartée lui dit : « Je te rappelle que Maxa est un diamant que tu n’as pas encore pris la peine de polir ! » On sait par ailleurs qu’en soulevant la sphère majeure, Ingrid parvient à développer un lien alors que l’objet ne lui est pas destiné. Cela probablement parce qu’elle est aussi une fille de l’Or (« Et ne crains rien, car même prisonnière dans le sombre monde du Plomb, tu restes toujours une fille de l’Or » lui dit Astartée avant qu’elle ne s’incarne sur Urizen, p.44). Il y a là une incohérence, nous semble-t-il.

Peut-on être exclusivement une fille de l’Or lorsqu’on contient en soi d’égales prédispositions au Plomb ? Est-ce là un mensonge d’Astartée destiné à mettre en confiance Ingrid-Thérionne avant son acclimatation dans son nouveau monde ? Cette phrase a-t-elle un sens caché ? Pourquoi une fille de l’Or ne craindrait-elle rien du monde du Plomb ? Toujours est-il qu’apparemment, les hommes capables de lire dans la mémoire du métal se divisent en deux catégories, comme les chamans ; la confrontation finale du peintre Grégor Podzamok avec son esprit-frère en atteste (sur Urizen il serait Macron, un sanguinaire seigneur de guerre, un être du Plomb donc, un chaman noir, ce qui expliquerait qu’il ait une vision chtonienne de l’Echelle).

Vraisemblablement, Grégor-Macron sera appelé par la suite à affronter Ingrid-Thérionne. Reste à savoir quel rôle jouera Maxa, qui pour l’instant refuse de retourner dans l’Echelle en rejetant son esprit-frère, et comment ces luttes à venir vont s’inscrire dans une certaine forme de prédestination (« l’engrenage » dont parle incidemment Astartée) dans la méta-quête du Divin. Il est évident que la famille d’Ingrid a un rôle à jouer dans le devenir du trio Ingrid-Maxa-Grégor. Les premiers Barreaux mis à jour par ses membres ne correspondent pas aux mondes dépeints par le chambellan de l’Antichambre (p.40) car celui-ci dit : « Six de nos novices ont découvert quatre nouvelles dimensions jouxtant la nôtre. » (nous soulignons). La case 3 de la planche 40 laisse entrevoir une trentaine de sphères liées aux plans révélés (Anselmo doit certainement venir de l’un d’entre eux). Reste donc à savoir ce qu’est devenu cette mystérieuse famille, si elle est liée à l’incident Trajan (cf. p.41), et quel pouvoir elle détient...

Au travers de ce grand brassage d’éléments disparates, associés avec une verve sûre et exigeante, il nous apparaît qu’Eric Liberge bâtit une œuvre-cathédrale, un vaste chantier métaphysique interrogeant d’une série à l’autre le rapport de l’homme à sa spiritualité, et au bien-fondé de ses croyances (la mixité des influences désamorçant toute vérité ultime). De cette constance ressort la profondeur d’une éthique de l’incertitude, nous semble-t-il. La forme même du récit - le choix du fantastique - et les recherches d’expression graphique sont appelées par une vision du monde qui leur assure une cohérence, une force unique. De manière indubitable, Métal déploie un espace de rêve extrêmement plus puissant que toutes les calembredaines exotiques prétendument fantasy dont on sait maintenant la prolifération. Dont acte : il faut savoir reconnaître les grands.

Monsieur Liberge, nous vous saluons !


Bibliographie de l’auteur :

Le dernier Marduk (P.M.J. Editions) - Epuisé

T1 : Léopold (2000)

T2 : Tiamat (2003)

Monsieur Mardi-Gras Descendres (Zone Créative / Pointe Noire / réédité en couleurs chez Dupuis en 2004)

T1 : Bienvenue ! (1998)

T2 : Le Télescope de Charon (2000)

T3 : Le Pays des Larmes (2001)

T4 : Le vaccin de la résurrection (2005)

Tonnerre Rampant (Soleil - 2002)

Métal (Soleil)

T1 : Le Musée d’Airain (2003)

Relayer (Pointe Noire / Editions Carabas - Dessin de Vincent Gravé)

T1 : Relayer (2001)

T2 : Le chasseur de papillon (2004)

Les Corsaires d’Alcibiade (Dupuis - Scénario de Filippi)

T1 : Elites secrètes (2004)


Un dossier sur Eric Liberge et son œuvre, agrémenté d’une interview avec l’auteur sur le site LeFantastique.net

Le blog d’Eric Liberge en personne

Le site des Editions Soleil

Le site des Editions Dupuis

par Alaric P.
Article mis en ligne le 13 septembre 2005