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Swing, de Tony Gatlif

Tony Gatlif reste fidèle à la communauté gitane à laquelle il consacre son nouveau film Swing. C’est l’histoire d’un jeune garçon qui par l’intermédiaire de la guitare va faire la connaissance d’une communauté qu’il ignorait. La musique joue donc un rôle très important dans ce film plutôt agréable auquel il manque toutefois un peu de folie pour emporter le tout.


C’est l’été, les vacances. Max, âgé de dix ans, les passe chez sa grand mère dans la banlieue de Strasbourg. Pas grand chose à faire à priori si ce n’est se mettre à la musique. Le jeune garçon se rend donc au quartier des gitans pour y faire l’acquisition d’une guitare et y fait la connaissance de son professeur, le musicien Miraldo, et de sa fille la jeune Swing.

C’est sur cette confrontation de deux mondes qu’est construit le nouveau film de Tony Gatlif. Max arrive dans un monde qu’il craint et qui ne paraît pas très hospitalier. Les jeunes du quartier s’en prennent à lui et le commerçants lui vend une guitare de qualité très moyenne. Pourtant, très vite, le film va dépasser ces premières difficultés pour se concentrer sur deux vraies rencontres : celle de Miraldo est son jeune élève à qui il va tenter d’apprendre tous les secrets de la musqiue manouche et celle des deux jeunes enfants pleine d’ambiguité et de non-dit. Max développe une vraie curiosité pour ce monde gitan qui va lui être très enrichissante.

La musique joue un rôle primordial. C’est elle qui réunit les personnages principaux ensemble mais surtout qui soude cette communauté gitane. De nombreuses scènes sont consacrées à de simples numéros musicaux en solo ou en groupe. On y retrouve certains airs traditionnels connus, déjà entendus dans les films de Kusturica et d’autres spécialement composés par trois musiciens (dont l’acteur qui joue le rôle de Miraldo) avec l’aide de Tony Gatlif.

La musique est aussi un des enjeux principal du film à savoir la mémoire. Ces chants et ces compositions sont menacés de disparition. Il est donc important pour Miraldo de trouver quelqu’un à qui transmettre toute cette culture. Le fait que Max vienne de l’extérieur montre aussi cette volonté d’ouvrir une communauté fermée à un plus large public. dans une autre scène, les hommes apprennent un chant dans une langue traditionnelle à de jeunes françaises. Ici Théo Gatlif met en abyme son propre rôle d’artiste puisqu’il a consacré à cette communauté plusieurs films dont certains ont plutôt bien marchés commercialement et qui ont contribué à changer leur image. Max discute avec plusieurs gitans, écoute leurs histoires comme cette touchante vieille femme qui raconte la déportation. Swing enregistre et donne à voir cette mémoire perdue.

Il n’est donc question ici que de franchir des espaces, des barrières pour se libérer des contraintes et aller vers les autres. Que ce soit Max qui saute par dessus la barrière de la propriété de sa grand-mère ou Miraldo volant au-dessus des paysages alsaciens, le film est un éloge de la liberté, de la légèreté. Celle-ci est d’autant plus facile à réaliser que les personnages principaux sont des enfants et que Swingse déroule pendant les vacances. Toutefois, la vision de Gatlif n’est pas utopique et à la fin, tous doivent réaffronter la réalité. Si les gitans sont libres en apparences, leur sédentarisation et leur manque de moyens limitent leurs possibilités et les mettent en danger. Swing, analphabète ne pourra rien faire du carnet de note que lui offre Max en souvenir. Elle restera là seule dans son quartier pendant que le jeune garçon lui part voyage en Grêce avec sa mère. La main tendue entre les deux communautés n’est clairement qu’un début, un geste terriblement inachevé. Il y a encore beaucoup de chemin à faire.

par Boris Bastide
Article mis en ligne le 18 octobre 2004