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Un jeu d’enfants

Paranormal flippant à la sauce française

Un couple de bourgeois parisiens vit paisiblement avec sa progéniture jusqu’à l’étrange visite des anciens propriétaires de leur appartement. Tout se détraque alors ; quand le paranormal surgit, la peur n’est pas loin et la folie guette. Et si les enfants n’étaient pas si innocents ?!


Voici donc le premier spécimen d’une série de films de genre Français mis en chantier par le label Bee Movies. Le cahier des charges est simple : un jeune cinéaste se confronte à un genre en ne disposant que d’un petit budget. Un jeu d’enfants se coule très précisément dans le cadre du film d’angoisse, là où l’ambiance prime sur les effets voyants et les coups de théâtre. Laurent Tuel l’a bien compris, qui n’abuse pas trop des gimmicks afférents au genre (montée brutale de la trame sonore, plan choc...) pour faire sursauter son spectateur.

Il réussit à distiller très efficacement l’angoisse en la faisant suinter de situations apparemment anodines de la vie quotidienne ; qu’il s’agisse de la froideur du regard d’un garçonnet, de portes fermées, ou d’enfants jouant dans une cave. Le mal est ici insidieux et avance caché (on voit toujours la conséquence et non l’événement en soi, excepté lorsqu’un des enfants renverse exprès son verre de peinture sur le tapis). A ce titre, l’idée d’ancrer la source du mal dans des êtres apparemment angéliques et inoffensifs, si elle n’est pas nouvelle (que l’on songe pour cela au Village des damnés de John Carpenter), joue un rôle évident dans la diffusion du malaise. En outre, le choix de Charles Berling et de Karin Viard pour jouer le couple confronté au paranormal, bourreau de la cellule familiale, est pour beaucoup dans la crédibilité des situations.

Laurent Tuel se refuse d’ailleurs d’en livrer véritablement la signification aux spectateurs. Pourquoi la possession est-elle uniquement infantile ? Est-elle le fait de l’appartement maudit ? De fantômes ? Marianne s’est-elle fait avorter ? On ne le saura pas, la fin du film ne résolvant rien (qui sont ces deux silhouettes au fond du parc ?).

Le caractère trouble du non-dit et l’incompréhension du phénomène non rationalisé accroissent la force d’impact de l’angoisse. Mais tout ceci est évidemment un peu gratuit, et d’aucuns diront vide de sens. Tout du moins, le film évite assez adroitement le grotesque et les sceptiques, adeptes de la distanciation amusée, n’y trouveront guère prise. Quant à ceux qui aiment frémir, cette histoire leur sera un régal.

par Alaric P.
Article mis en ligne le 20 avril 2004