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Musique brésilienne : par-delà la samba...

S’il y a un pays qui fait vraiment rêver les Français, c’est bien le Brésil. Pays de l’insouciance et de l’euphorie par excellence, le Brésil nous fascine pour sa culture exotique. Les premiers mots qui viennent à l’esprit de la plupart des gens lorsque l’on parle du Brésil, sont "football", "samba", "soleil", "plage", "cocotiers", etc. Mais qu’en est-il réellement ? Et notamment pour la musique ? N’y a-t-il rien par-delà la samba ?


La culture brésilienne, ce n’est cependant pas que la samba ou le football. Bien au-delà du cliché simpliste et réducteur que certains peuvent envisager, la culture brésilienne est d’une hétérogénéité incroyable.

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Capoeira

L’identité du peuple brésilien, et par conséquent de la culture qui en émane, est composée certes, par les cariocas de Rio, mais aussi par les travailleurs pressés de São Paulo, ou bien, et on le sait beaucoup moins, par les habitants de Curitiba, ville dans laquelle il est aisé de se croire en Allemagne au regard du climat froid, de la morphologie des gens, du train de vie européen ou de la culture germanique omniprésente. C’est tout cela le Brésil : une nation multicolore, bref, une nation surprenante.

Pour la musique, c’est pareil. La samba n’est qu’une infime composante de la diversité musicale qui fait la vraie identité du Brésil. Bien au contraire, le Brésil produit de la musique au pluriel. La confluence de diverses cultures a engendré une multiplicité d’inspirations orientant ainsi de manière originale la musicalité brésilienne.

Par conséquent, tout l’intérêt de cet article sera d’envisager la musique brésilienne sous ses aspects les plus révélateurs.

La musique classique

L’Europe n’est pas toute seule à avoir produit de la très grande et très belle musique classique. Si certains auteurs comme Franz Schubert sont des génies incontestables, il n’en reste pas moins que le Brésil a aussi ses génies aux musiques raffinées et envoûtantes.

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Villa Lobos

C’est plus particulièrement le cas de Heitor Villa Lobos, né le 5 mars 1887 à Rio de Janeiro. Ce grand compositeur était normalement destiné à la médecine, et avait même reçu l’interdiction de sa mère de jouer au piano. Son destin triompha cependant, et Villa Lobos devint une référence incontestable de la grande musique brésilienne. Il est même considéré comme le plus grand compositeur de toutes les Amériques. S’il est très connu en France, c’est en partie parce qu’il a vécu près de sept années à Paris, où il fit un immense succès. Sa mélodie la plus populaire est Aria (Cantilena) da ‘Bachianas Brasileiras n°5’. Cette meéodie, avec une touche de mélancolie et d’espoir à la fois, est absolument percutante. On peut également citer Tocata - O trenzinho da Caipira dans lequel le voyage du train est parfaitement et génialement transcrit musicalement.

LA MPB

S’il y a une chose essentielle à dire sur la musique populaire brésilienne, c’est qu’elle est extrêmement riche. Son histoire commence avec le mélange entre la musique des colonisateurs jésuites et la musique indigène. Ce mélange créa des rythmes primitifs qui évoluèrent vers des styles particuliers comme le cateretê ou le cantochão, qui encore aujourd’hui, sont joués dans certaines fêtes populaires. C’est cependant au XVIIème siècle que la MPB prendra toute sa force, avec la combinaison de deux styles musicaux : le premier, dénommé landu, est une danse africaine très rythmée, et le second, dénommé modinha, d’origine portugaise, est d’un ton très romantique et sentimental.

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Tom Jobim au piano chez lui

A ces deux courants fondamentaux, se sont greffés à travers les époques, de nombreux autres styles. La samba est ainsi un "produit" de la MPB, dont l’avènement définitif sera symbolisé par la naissance de la première école de samba, Deixa Falar, fondée en 1929. On trouve cependant d’autres styles musicaux émanant de la MPB. Ainsi par exemple le pagode, qui est né à Rio de Janeiro à l’occasion de petites fêtes organisées dans les petites cours des maisons de la banlieue carioca afin de chanter la joie des personnes qui vivaient là-bas. Ou encore le sertanejo, musique particulière, d’un style country-romantique. De grands maîtres de la MPB se sont illustrés : on pense immédiatement à Tom Jobim, d’un style très bossa-nova, ou Gilberto Gil, Milton Nascimento, Caetano Veloso ou Chico Buarque. Plus récemment, on a assisté à l’ascension de Tribalhistas, ou Marisa Monte.

Axé

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Daniela Mercury

Comment ne pas faire allusion à la musique axé (prononcez [achè]) ? Musique du Nordest brésilien, symbole sacré du carnaval de Salvador de Bahia, ce style est très rythmé, entraînant et joyeux. C’est avec le samba, la musique pour faire le carnaval dans toute sa splendeur ! Le plus grand groupe s’étant illustré dans ce domaine est É o Tchan !, notamment avec ses titres "Geração 2000", "A Dança do Bumbum", ou encore "A Lourinha". D’autres chanteurs illustrent la musique axé, tel est le cas d’Eva, Chiclete com Banana ou Daniela Mercury.

Le funk

La joie disproportionnée peut parfois cacher un malaise plus profond. Les malaises de la société brésilienne sont, eux aussi, traduits dans la musique. Le rap dénonciateur français a sa contrepartie au Brésil. Sauf que le rap ou le R’n’B ne font pas fortune là-bas. C’est plutôt le funk. Ce sont dans les favelas que ce style a pris un essor tout particulier. Les bailes funk ("bals funk") animent la population des favelas et permettent, à l’occasion, les deals de la misère humaine. La musique qui ressort de ce contexte est tout à fait particulière. Le funk brasileiro se distingue du funk US par sa légèreté pourtant fataliste. Des groupes comme Furacão 2000 ou Bonde T’Zão à Brasília se sont démarqués honorablement. Beaucoup de titres sont ainsi restés ancrés dans les âmes : on peut se souvenir notamment de "Pikachu 2", "Funk do milenium", "Bonde do Tigrão" ou "Cavalo de Pau". Entrer en contact avec le funk brésilien, c’est se transposer dans un autre monde, un dépaysement assuré !

Voilà pour ce très bref balayage de la musique brésilienne. L’enseignement principal qui peut en être tiré est la très grande diversité de la musique brésilienne. Le samba est finalement là-bas, tout aussi apprécié que le funk, la MPB de Tom Jobim ou la musique classique de Villa Lobos.

par Simon Caqué
Article mis en ligne le 21 février 2005