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Prince of Persia

De la 2D à la 3D, ludicité conservée ?

Bien souvent, le passage de nos vieux jeux de la seconde à la troisième dimension nous a déçus. C’est triste, mais on préfère souvent notre amas de pixels qui tournait sur l’Amiga/Amstrad/AppleII acheté par papa-maman à la nouvelle mouture disponible pour notre Playstation flambant neuve. Prince of Persia, un jeu d’aventure existant depuis la nuit des temps, a été repris pour la Playstation 2. Ce jeu va-t-il nous décevoir comme ses compères ?


Vous rappelez-vous de Rayman ? Et de Pitfall ? Trouvez-vous vraiment que l’utilisation de nouvelles technologies ait contribué à l’amélioration du gameplay ? Indéniablement, non.

Souvent, l’adaptation d’un jeu 2D en 3D n’avait qu’un seul et unique but : en mettre plein la vue au joueur. Ce dernier, époustouflé par les prouesses techniques des développeurs, prend plaisir à jouer quelques instants, mais rapidement, le gameplay [1] redevient le critère déterminant. Une impression de lassitude s’installe, et le joueur se désintéresse du jeu. Pensez à tous ces jeux de 3D que les éditeurs se sont acharnés à adapter. Prenons Street Fighter, les versions se sont multipliées en 3D, mais jamais le gameplay n’était aussi mauvais. Le graphisme était pourtant d’une qualité indéniable, les animations étaient pourtant fluides : dans ce genre de réalisation, tout était techniquement parfait. Mais les développeurs oubliaient de travailler l’essentiel : le plaisir du joueur au travers de la ludicité du produit. C’est surement pour cela que les joueurs nostalgiques de ce bon vieux temps, conservent et jouent toujours à ces vieilleries en 2D. C’est même devenu un véritable phénomène : l’abandonware. De nombreux sites internet comme Lost Treasures traitent le sujet et proposent à l’Internaute de télécharger les programmes étant assez vieux pour l’être. [2].

À part quelques exceptions (Mario par exemple, pour lequel Ubi Soft a su nous offrir un jeu beau, agréable et terriblemen envoutant), le passage à la 3D n’est que très rarement une réussite.

(JPEG)

Initialement, Prince of Persia, est un jeu développé par Jordan Mechner (qui a également fait Karateka) pour l’Apple II. C’était la bonne époque : on faisait un jeu dans sa chambre, on envoyait la disquette à un éditeur, et il le distribuait. Si le jeu rapportait des brouzoufs, on en décidait le portage sur plein de machines, pour augmenter les bénéfices. Prince of Persia a été un véritable hit en son temps, et a été adapté sur la NES, PC, Amstrad et tout le toutim. Le concept avait bien marché, alors pourquoi ne pas refaire l’histoire en programmant un nouveau jeu ? Ca peut toujours rapporter...

Prince of Persia, version originale (JPEG)

Bien souvent, la reprise d’un jeu par un gros studio est plutôt décevant (pensez à Earthworm Jim...). Ici, c’est une réussite totale... Si la durée de vie est plutôt courte puisqu’il ne faut, environ qu’une quinzaine d’heures de jeu pour en venir à bout de l’aventure, on ne se lasse pas de son gameplay en béton.

Ce nouveau Prince of Persia est donc une réussite. L’intrigue est différente des premiers opus, et pour une fois, le Prince n’aura pas à aller délivrer une quelconque princesse ! Non, non, le Prince est rentré des courses, avec son père, un énorme sablier sous le bras. Le Vizir (par définition méchant, comme dans tous les jeux en rapport avec Les mille et une nuit) pense que la personne susceptible d’ouvrir le sablier connaîtra gloire et fortune. Vous vous y frotterez et courrez chercher la dague du temps, sorte de décapsuleur magique pouvant ouvrir ce fameux sablier. Malheur ! Le sable libéré n’offre que du malheur au royaume : ses habitants, ainsi que tous les êtres vivants sont transformés en monstres. Comme les enfants bien élevés, le Prince répare ses bêtises, et il ira récupérer tout le sable éparpillé pour restaurer le bonheur du royaume. D’autres péripéties s’invitent à la fête : en chemin, le Prince fera de multiples rencontres. Parmi celles-ci, Farrah, une jeune fille, se mêlera à l’aventure pour apporter aide et réconfort. Bien que peu fournie, la panoplie d’actions disponibles permet au joueur d’avoir une interaction intéressante avec l’environnement qui est proposé par les développeurs de Prince of Persia. On s’amuse à sauter de murs en murs, à courir sur ces derniers...

Le graphisme est fouillé, et sert le jeu d’une manière impressionante. Les décors, aussi réussis les uns que les autres, vous étonneront de par leur beauté au cours de votre découverte. Le détail des graphismes, la fluidité des mouvements [3] font de ce titre une référence incontournable graphiquement parlant. Le level-design [4] est également réussi, et vous donnera du fil à retordre, sans pour autant vous laisser dubitatif sur une énigme pendant des heures.

On évolue alors dans cet univers, alternant action et reflexion. Tout est parfaitement dosé, les énigmes sont simples, tout en gardant un interêt. Les combats sont très esthétiques, et on s’amuse à faire sauter notre Prince au dessus de ses ennemis avant de leur donner le coup final. Ces derniers sont particulièrement bien faits, la panoplie de coups disponibles n’est pas impressionante, juste suffisante pour permettre au joueur de varier. On regrettera néanmoins le peu de diversité dans les ennemis (vous ne croiserez qu’une petite dizaine de différentes variétés de ceux-ci, chacune ayant ses propres points faibles). Ainsi que l’impossibilité d’exécuter certains coups, au vu des contraintes d’espace : déclencher une prise où l’on doit s’appuyer sur un mur alors que les pièces sont gigantesques n’est pas aisé... Mais cela ne donne que plus de plaisir lors des rares exécutions possibles : avec un air béat, il n’y a plus qu’à contempler l’animation où le prince prend appui pour porter le coup fatal à l’adversaire.

Néanmoins, quelques détails énervent toujours. Citons la caméra parfois mal placée, les combats peu réalistes, ou encore quelques bugs de collisions. Mais ces derniers passent inaperçus compte tenu de la qualité de la réalisation. La liberté de mouvement n’est pas impressionante, mais suffit à interagir suffisament avec le monde qui s’offre à nous.

Prince of Persia, lavé à la machine, programme à 90° (GIF)

Malgré ces quelques défauts, on s’identifie rapidement au personnage. Son caractère macho et individualiste (donc, indéniablement humain) en fait un héros simple, attachant, sans tomber dans le caractère pédant de la majorité des réalisations vidéoludiques. On prend plaisir à jouer, à essayer de nombreuses combinaisons et à recommencer les missions engagées en changeant notre manière de jouer.

Bref, vous l’aurez compris, Prince of Persia est un jeu fabuleux de par son gameplay équilibré, ses graphismes alléchant et son ambiance générale. Malgré ses quelques petits défauts, on se prend rapidement au jeu, et on s’identifie au personnage. Malgré une durée de vie assez réduite, ce jeu vous assurera quelques nuits devant votre écran. Aucun raison qu’il ne fasse pas parti de votre ludothèque, surtout que ce titre est désormais disponible en version Platinum. A acheter, donc.

par Julien Delange
Article mis en ligne le 25 octobre 2004

[1] Donner une définition exacte du gameplay est difficile, tellement l’interprétation de ce mot peut être subjective. Ce terme correspond au plaisir que l’on prend à jouer, indépendament des élements techniques du jeu. Le gameplay rassemble les éléments offerts au joueur : décors, environnement sonore... C’est avant tout une combinaison d’éléments qui permettent de définir globalement un jeu.

[2] Sachez simplement que l’abandonware n’a aucun rapport avec le piratage. Ces jeux sont disponibles en téléchargement de manière légale (que le programme soit passé dans le domaine public, ou que l’éditeur ait donné son accord vu l’âge du jeu...)

[3] Altérée par quelques légers ralentissement sur quelques scènes

[4] Le terme de level-design désigne le soin qu’ont apporté les développeurs à tout l’environnement : aussi bien les décors que leur agencement ou tous les détails qui s’y rattachent


- Un jeu basé sur l’univers de Prince of Persia était sorti sur Dreamcast, mais n’était pas distribué en Europe.
- Site web de Lost Treasures (abandonware en France) : abandonware-france.org/

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