Cinéma · Musique · Littérature · Scènes · Arts plastiques · Alter-art 

accueil > Arts plastiques > article

La mer, terreur et fascination

Exposition à la BNF (site Mitterrand) à Paris du 13 octobre 2004 au 16 janvier 2005

Du temps où l’homme antique peuplait la mer de monstres fantasmagoriques aux découvertes scientifiques récentes, la mer n’a cessé d’être source de fascination et de terreur pour l’homme. La Bibliothèque Nationale de France et son pôle associé brestois, spécialisé en océanographie, retracent l’évolution et les contradictions du rapport que l’homme entretient avec la mer, entre imaginaire et progrès de la connaissance, à travers cinq thèmes : « la mer inconnue », « les colères de la mer », « les merveilles de la mer », « mer et création », « menaces contemporaines ».


L’exposition présente une grande diversité de supports : cartes, manuscrits, tableaux, herbiers, photographies, bornes interactives. On pénètre dans une pièce sombre, où de vastes écrans obliques restituent le roulis des vagues et la « respiration » de la mer, et c’est sans peine qu’on se laisse embarquer dans cet itinéraire, au gré des représentations et des outils de navigation, où la mer jamais ne perd de son fascinant mystère. Dès les origines, la mer apparaît comme une source de vie tout autant que comme un élément dangereux. Les hommes y voient l’instrument de divinités qu’ils tentent d’apaiser et développent des techniques pour y naviguer et la découvrir. De ce fait, imaginaire et techniques se sont trouvés très tôt imbriqués dans l’effort de conquête de cet espace naturellement hostile à l’homme. C’est ainsi que l’Athènes classique conquit son pouvoir : des temples dressés en honneur à Poséidon et aux dieux et de sa maîtrise dans la construction des trières et dans l’art de naviguer. Contrôler les mers apparaît très vite comme un enjeu stratégique : Rome, puis Venise et les Républiques italiennes l’ont bien compris.

Les bateaux et les outils de navigation se développent rapidement, de sorte que les traversées deviennent moins aléatoires. La question de la vastitude et de la profondeur de l’océan sont au cœur des réflexions au Moyen Age et à la Renaissance : les voyages d’exploration se développent. Les premières cartes tentent de discerner les contours et les dangers, les vents et les courants, comme le portulan [1] dit « carte pisane » de 1290, qui trace les contours de la Méditerranée, ou encore la carte établie au retour de Christophe Colomb, qui tente de restituer les côtes américaines.

La question de la profondeur de l’océan et des créatures qui le peuplent suscitent autant de fantasmes que de recherches scientifiques. Platon pensait que le fond marin communiquait avec le centre de la terre. Or connaître la profondeur de l’eau permettait d’éviter l’échouage des navires. Dès 1534, Hermann cherche à renouveler les instruments ancestraux, dont le fil à plomb, et dessine un « archéobathymètre » et des scaphandres pour sonder l’océan. Il faut attendre 1725 pour que s’amorce l’apparition de la cartographie scientifique du fond des mers avec l’histoire physique de la mer de Marsigli. La quête des profondeurs amène la découverte de nouvelles espèces, qui côtoient les êtres imaginaires : les représentations de créatures monstrueuses et de sirènes enchanteresses se perpétuent, tout autant chez Olaüs Magnus ou Guillaume Rondelet au XVIè siècle, que chez Jules Verne ou Victor Hugo.

Mais si les découvertes progressent, elles n’en empêchent pas moins les naufrages et les tempêtes qui continuent d’effrayer les marins et d’inspirer les artistes. Le naufrage revêt une symbolique toute particulière. Il est un rite initiatique, comme dans les légendes liées aux missionnaires irlandais, dont saint Colomban, ou encore un apprentissage des valeurs de solidarité et de découverte de soi. La mer fait figure d’instrument de la colère divine, comme dans l’Iliade et l’Odyssée. Cependant, à l’heure actuelle, le rapport s’est presque inversé : les techniques ont rendu la mer moins menaçante pour l’homme, et c’est l’homme qui est devenu un danger pour la mer en la polluant et en l’exploitant à outrance. L’exposition s’achève sur un bien triste constat.

La Mer est précisément le genre d’expositions auxquelles on s’attend de la part de la Bibliothèque Nationale : pédagogique sans être fastidieuse, bien documentée et pluridisciplinaire. Elle mêle l’histoire, les sciences, les croyances, les arts et les techniques. L’ambiance dans laquelle nous nous retrouvons plongés dès la barrière franchie rend le parcours plus fluide. Et pour tous ceux qui désirent en savoir davantage, un espace est aménagé pour lire des ouvrages complémentaires, dont le catalogue de l’exposition, tout en écoutant de la musique. Il est également possible de retrouver l’exposition sur internet et de consulter le dossier pédagogique.

par Sandrine
Article mis en ligne le 27 décembre 2004

[1] Document mis au point par les navigateurs, surtout génois et vénitiens, des XIIIè et XIVè siècle, contenant la description des ports de mer et des côtes, ainsi que tous les renseignements utiles à la navigation et à l’accès de ces ports, et pouvant être accompagné d’une carte.

Légende des images, de haut en bas, logo exclu :
- première image : Barthélemy l’Anglais (vers 1190-après 1250)
- deuxième image : Vue des douanes à Venise, Codex Maggi.
- troisième image : Katsushika Hokusai, La Grande Vague (Kanagawa oki namiura)
- quatrième image :Ulysse et les Sirènes (British Museum)

Informations pratiques :
- artiste : divers
- dates : du 13 octobre 2004 au 16 janvier 2005.
- lieu : Bibliothèque Nationale de France (BNF), site François-Mitterrand, Quai François-Mauriac - Paris XIIIe (accès : Métro : Bibliothèque - Quai de la Gare)
- horaires : du mardi au samedi de 10h à 19h, le dimanche de 12h à 19h. Fermeture lundi et jours fériés
- tarifs : Entrée : 5€ , tarif réduit : 4€
- renseignement : site Internet de la BNF et 01 53 79 59 59

Pour aller plus loin en lisant :
- La mer. Terreur et fascination Catalogue de l’exposition. Coédition Bibliothèque nationale de France / Seuil, Relié, 26,5 x 36 cm, 208 pages et 250 illustrations, ISBN 2-7177-2288-2, Prix : 50 €
- La mer. Terreur et fascination Album de l’exposition, Édition Bibliothèque nationale de France, Broché, 23,4 x 30 cm, 56 pages et 75 illustrations, ISBN 2-7177-2320-X, Prix : 9,50 €

Pour en savoir plus sur Internet :
- exposition virtuelle sur la Mer sur le site de la BNF
- le Musée national de la marine avec une exposition virtuelle sur Napoléon et la mer et bien d’autres

imprimer

réagir sur le forum

outils de recherche

en savoir plus sur Artelio

écrire sur le site