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De la représentation à l’action

Exposition au Plateau à Paris du 12 décembre 2002 au 16 février 2003

Le Plateau présente une programmation décidément marquée par l’action, comme cette nouvelle exposition qui succède à celle intitulée "Maquis", le suggère... Cette manifestation souligne une nouvelle fois le caractère dynamique et innovant du centre d’art parisien.


De la représentation à l’action a été présentée au Centre d’Art contemporain Ex Teresa Arte Actual de Mexico et à la galerie Santafé de Bogota. Elle est à présent hébergée par le Plateau ainsi que par Main-d’œuvre à Saint Ouen. Au Plateau, 11 artistes se partagent l’espace d’exposition. 11 artistes, 11 approches autour de la question du corps et ce qu’il peut dire et signifier. Maria Ines Rodriguez, commissaire général de l’exposition, a rassemblé des artistes contemporains venant d’Europe et d’Amérique Latine, plus précisément du Mexique et de Colombie.

Quel est ce corps dont nous parlons ? Maria Ines Rodriguez parle d’un "corps-discours". Aux réponses des 11 artistes s’ajoutent celles des spectateurs qui acceptent de se prêter au jeu de Ma. Angelica Medina qui a laissé à la disposition du public des silhouettes sur papier que nous sommes invités à prendre comme support de notre propre discours sur le corps. Ce corps est absent dans l’œuvre de Charlotte Von Poehl. Elle investit la première pièce de l’espace du Plateau en couvrant le sol de 4000 petites pièces de pâte à modeler de même taille aux couleurs vives. Évoque-t-elle le corps de l’artiste manipulant, modelant les petits morceaux de pâte ? Nous confronte-t-elle à une métaphore du corps social où se juxtaposent de minuscules individualités ? Nous entrons avec cette œuvre doucement dans le vif du sujet, intrigués par une étrange odeur de fraise...

L’Œuvre vidéo de Juan Fernando Herra pose clairement le question du corps. Il se filme lui-même pendant 5 minutes, mangeant de l’herbe, la mâchant lentement et recrachant une boule verte. Sur le ton de l’humour, il aborde la question de la relation du corps à son environnement, le rapport de l’organisme humain à un corps étranger qui n’est pas un élément nutritif habituel. Son action nous incite également à nous poser la question du lien entre corps humain et corps animal.

À travers les photographies et dessins mêlés au texte de Wilson Diaz, ainsi que les photographies et vidéos illustrant le Festival de performances de Cali (Colombie) du collectif Helena Produciones, nous entrons dans des approches artistiques fortement liées à des réalités historiques et politiques contemporaines. Le corps est au centre d’un processus de contestation politique et d’expérimentation artistique. Dans l’œuvre de Diaz, le corps est un corps agissant, ignorant les limites de la légalité comme les limites biologiques et physiques. Le travail d’Helena Produciones est un corpus documentaire sur le Festival de performance qui se tient à Cali depuis 1997 et qui représente ainsi un temps fort pour la création colombienne et contemporaine en général.

Toujours cette odeur de fraise... Elle vient en fait de la pièce où est exposé le travail de l’artiste mexicain, Pablo Leon de la Barra. Il a imaginé et installé une Chambre d’ado. Rose bonbon, couverte d’une moelleuse moquette du même ton, cette chambre est couverte d’affiches issues de magazines d’ados. Magazines, odeur de fraise et ambiance sonore créée par un autre artiste, Manuel Jaramillo, font le décor de ce lieu privilégié. Le corps adolescent, pourtant absent en tant que tel, s’exprime à travers les icônes recouvrant les murs et dans l’atmosphère intime de la pièce. Se dessine ici un corps-désir. L’érotisme pubère omniprésent et l’odeur insupportable de fraise rendent au fur et à mesure la pièce étouffante. Mais ce mal-être adolescent préfigure seulement le malaise inhérent à l’installation de l’autrichienne Elke Kystufek.

Dernière pièce de l’exposition, et pour moi une des plus marquantes : son installation mêle peinture, photographies, vidéos et tissus. Le sujet central de son travail, son propre corps. Un corps malmené, travesti, exhibant sa plus grande intimité. Elle semble vouloir décliner la représentation de son corps à l’infini, jusqu’à épuisement. Son corps devient le lieu de l’expérimentation artistique par les supports utilisés, par le déguisement, par le choix des parties de son corps qu’elle photographie et montre au public. La sexualité est omniprésente mais elle n’est pas suggérée, elle est offerte mécaniquement à l’œil du spectateur telle une image pornographique. Tellement immédiatement donnée, qu’elle en devient banalement vulgaire ou violente.

En bref, une exposition riche et passionnante, bien menée, posant une question certes traditionnelle en arts plastiques mais toujours cruciale pour la création contemporaine.

par Vanessa Desclaux
Article mis en ligne le 2 janvier 2003

Légende des images, de haut en bas, logo exclus :
- première image :Maria Ines Rodriguez
- seconde image :Maria Ines Rodriguez

Informations pratiques :
- dates : du 12 décembre 2002 au 16 février 2003
- lieu : le Plateau FRAC Ile de France, Angle de la rue des Alouettes et de la rue Carducci, 75019 Paris
- renseignements : 01 53 19 84 10 et site internet

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