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Alfred Stieglitz et son cercle

New York et l’art moderne (1905-1930) Exposition au Musée d’Orsay à Paris du 19 octobre 2004 au 16 janvier 2005

Alors qu’aucune rétrospective sur Stieglitz n’a encore eu lieu en France, le Musée d’Orsay se propose grâce au don de la Fondation Georgia O’Keeffe et dans le cadre du mois de la photo de présenter non pas toute l’œuvre du photographe mais ses rapports avec la modernité américaine et les artistes européens de la même époque.


Alfred Stieglitz (1864-1946), naît à New York, durant la guerre civile. Il est l’aîné d’une famille de six enfants. Passionné très tôt par la photographie, c’est à l’âge de 19 ans qu’il prend ses premières photos alors qu’il est à Berlin. Son travail se caractérise dès ses débuts par une volonté d’expérimentation et de dépassement de la photographie de son temps. De retour à New York il prend principalement des vues de la ville moderne et de ses immeubles. C’est en 1902 qu’il acquiert une renommée internationale après l’organisation de l’exposition de photos à laquelle participent les membres de son groupe Photo-Secession.

L’exposition d’Orsay débute sur un autoportrait de Stieglitz : cette photographie annonce dès l’entrée la volonté de cerner l’artiste. Dans une première partie, l’exposition explique le rôle de Stieglitz dans la promotion de l’art avant-gardiste européen aux États-unis par l’intermédiaire de sa galerie. 291, c’est le nom de la galerie : à l’origine au 291 de la Cinquième Avenue, elle déménage finalement au numéro 293. C’est à travers elle que des artistes comme Picasso, Cézanne, Matisse, Brancusi purent s’exporter sur l’autre continent et se faire connaître du public et des collectionneurs américains. Les œuvres présentées sont celles (autant que possible) qui furent exposées dans la galerie de Stieglitz. Amateur et collectionneur, il sut aider en particulier les artistes qui faisaient scandale tels Rodin, et Duchamp dont la fontaine-urinoir avait été refusée à l’exposition de la société des artistes indépendants. C’est aussi à travers la revue Camera Work, dont Stieglitz est l’éditeur, que la diffusion de cet art moderne européen peut se faire, par le biais de photographie des artistes et de leurs travaux. Outre les européens, Stieglitz soutient aussi le travail d’artistes américains aujourd’hui moins connus de nous comme Marsden Hartley, Arthur Dove, John Marin...

Les œuvres d’artistes exposées nous informent aussi sur les goûts de Stieglitz en matière d’art. On remarque que ses influences sont, chez les peintres et dessinateurs, Rodin et Cézanne. Curieusement, aucune œuvre photographique autre que celles de son mouvement Photo Secession n’est présentée comme ayant pu l’influencer ou simplement comme ayant été exposée à la galerie. Les œuvres de ce mouvement sont principalement regroupées au centre de la salle comme un "noyau source d’inspiration" autour duquel gravitent les photos de Stieglitz et de son cercle. Enfin, cette première partie permet de restituer son travail photographique dans le contexte plus large de l’art moderne à cette époque. Son œuvre prend alors une autre dimension confrontée à des travaux de différentes formes (peinture, sculpture, dessin...), et de divers continents (Europe, Afrique). Se côtoient la Montagne sainte Victoire de Cézanne, les masques africains, les sculptures de Brancusi et des photographies de la Cinquième avenue... On voit ce qu’avaient sous les yeux les artistes américains en ce début de siècle, et ce qu’ils connaissaient de l’art européen.

La seconde partie nous conduit dans un univers intimiste et vers un travail plus personnel de Stieglitz. Une première salle s’ouvre sur son couple et le travail de sa future femme, peintre, elle aussi, Georgia O’Keeffe. Une salle lui est d’ailleurs consacrée. Sur le mur face au travail de cette jeune artiste, sont accrochées des photographies de fragment de son corps prises par Stieglitz. C’est un très beau face-à-face entre son identité d’artiste et son identité de femme, remarquablement révélée par Stieglitz. Le va-et-vient, et la fusion des arts des deux artistes sont illustrés par la sculpture de O’Keeffe exposée au fond de la salle, reprise dans une photo de Stieglitz. L’exposition finit avec plus de photos qu’elle n’avait commencé. On retrouve des "Portraits" de Georgia O’Keeffe, sous forme de fragments ce qui n’est pas sans rappeler le travail de Rodin dans ses fragments anatomiques. Puis Stieglitz se détourne des vues de New York pour un travail plus rêveur, voir abstrait tel que sa série de nuages Équivalents. Loin du monde agité de la ville, il oriente son regard vers la nature et ses détails tels des touffes d’herbes ou des branches d’arbres.

L’exposition nous montre donc à la fois le côté mondain et intime du personnage. Ce double portrait se retrouve dans l’organisation des photographies. Au début, les oeuvres sont ouvertes sur le monde extérieur avec des portrait d’artistes, des vues de New York, des photographies de son lieu de travail -la galerie 291-, puis elles se recentrent sur des portraits de sa femme de son entourage proche et enfin des morceaux de nature. On découvre donc à travers ce parcours un peu du Stieglitz photographe mais surtout le Stieglitz passionné d’art. Ce point de vue atypique, est particulièrement intéressant dans les liens qu’il tisse entre les différentes formes d’art. Le musée d’Orsay rend ainsi un très bel hommage à l’artiste, à l’homme, et l’amateur collectionneur qu’était Stieglitz.

par Tiphaine
Article mis en ligne le 16 décembre 2004

Légende des images, de haut en bas, logo exclu :
 première image : Arthur Dove, Rain, 1924, Washington, National Gallery
 deuxième image : Georgia O’Keeffe, Orange and Red Streak,1919, Philadelphia, Museum of art
 troisième image : Auguste Rodin, Enfer, 1900-1908, Paris, Collection André Bromberg
 quatrième image : Stieglitz, from my window at the Shelton, looking west, 1931, Boston, Museum of Fine Arts

Informations pratiques :
 artiste : Alfred Stieglitz
 dates : du 19 octobre 2004 au 16 janvier 2005
 lieu : Musée d’Orsay, 62, rue de Lille, 75343 Paris cedex 07
 renseignements : site du musée et 01 40 49 49 78 / 01 40 49 48 00

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